Dans la nature, l’enfant jubile
Pédagogue célèbre de l’enfance et l’éducation, Bernadette Moussy a bien voulu partager avec nous une conversation sur l’enfant et la nature. Récit de ce face à face avec cette passionnante historienne de la pédagogie.
Quand un enfant s’aventure dans la nature…
Il existe un lien particulier entre l’enfant et la nature. Quand l’enfant sort et rencontre la nature, il se rencontre lui-même, car la nature est en pleine croissance, comme lui. Il y a une identification. D’ailleurs les hommes et la nature ont la même origine, nous sommes tous issus de la « soupe primordiale » dont parlent les scientifiques.
Dans la nature, l’enfant pousse des hurlements de joie, il jubile. En manipulant de l’eau ou de la terre, en découvrant la métamorphose de la nature, il éprouve de la gratitude, l’envie de dire merci. Et même un besoin de spiritualité qui s’exprime.
Comme lui, la nature évolue. C’est pourquoi il est important que l’enfant sorte régulièrement dans la nature, pour y observer les changements, l’action du temps, pour y découvre le rythme de la vie de la nature. Il remarque aussi la disparition. La mort, lorsqu’une plante ne pousse pas.
Dans l’observation de cette évolution de la nature, l’enfant s’interroge. L’étonnement devant le mystère de la vie, devant cet invisible est stimulante.
L’enfant est-il plus libre dans la nature ?
Bien sûr ! Dans la nature, l’enfant découvre la liberté, avec ses limites puisqu’il faut respecter le vivant, se respecter soi-même ainsi que les autres. Dans un environnement limité et sûr, l’enfant vit beaucoup plus d’expérimentations.
Étant dans une approche globale du monde, l’enfant ressent beaucoup plus de choses dans la nature que nous, les adultes, il découvre les liens entre les éléments. Il voit le tout mais il se concentre aussi sur les détails, insectes, feuilles…
L’enfant part-il facilement à l’aventure dans la nature ?
S’il se sent en sécurité, s’il se trouve dans un contexte confortable, l’enfant se lance. Armé et vulnérable, il a envie et peur en même temps. Cette ambivalence est celle de l’aventure et de la vie en générale.
Mais se lancer dans l’inconnu où par nature, on ne peut rien anticiper, est fatigant. C’est pourquoi l’enfant a besoin d’une vie régulière avec des moments qu’il connaît, des choses récurrentes et de-ci delà, des aventures.Lorsqu’on observe un tout-petit s’attarder à jouer avec de l’eau ou de la terre, on perçoit émerveillement, gratitude. La nature le fait grandir parce qu’elle le rend plus fort en renforçant sa confiance en lui et au monde qui l’entoure. La nature lui fait découvrir le lien entre les éléments, la régularité, la relation de cause à effet, elle lui montre que la vie a un sens.
Titulaire d’une thèse de troisième cycle en sciences de l’éducation (« Pauline Kergomard et l’école maternelle à la fin du 19éme siècle »), professionnelle reconnue et érudite, Bernadette Moussy a enseigné la pédagogie et l’histoire de l’éducation durant plusieurs dizaines d’années.