Le besoin d’affection est universel
Catherine Gueguen est pédiatre. Pendant trente ans, elle a vu des parents démunis devant leurs enfants traversés par les émotions. Et puis elle a découvert les neurosciences, une discipline assez récente, puisqu’elle n’a qu’une quinzaine d’années. Et elle a trouvé les mots pour expliquer simplement comment le cerveau des enfants se développe et surtout comment se comporter pour qu’il grandisse bien.
En 2019, la Semaine Nationale de la Petite Enfance s’est intéressée au thème « Pareil, pas pareil ». Interrogée sur le sujet, voici en trois temps ce que Catherine Gueguen offre comme éclairage.
Petit un : Chaque enfant est unique.
En premier lieu, le corps de chacun est unique.
Mais ce qui nous distingue le plus, c’est notre environnement. Le plus important, c’est ce que va vivre l’enfant, les rencontres qu’il va faire. Les neurosciences affectives et sociales nous apprennent que « nous sommes faits pour la rencontre humaine (…) et chaque rencontre nous modifie, affecte notre corps, notre cerveau, nos émotions, notre esprit, notre être. » (1)
Quand on s’occupe d’un enfant, le plus important est donc de comprendre dans quel environnement il vit.
Petit deux : Nous avons tous les mêmes besoins fondamentaux.
« Dès l’aube de leur vie jusqu’à leur dernier souffle, les humains désirent tout d’abord être aimés, mais aussi être réellement écoutés, respectés, reconnus pour ce qu’ils sont. » (2)
Ce besoin d’affection est universel. Car jusqu’à 6 ans, tout enfant, quel que soit son environnement, est démuni face à ses émotions, son cerveau n’est pas développé pour faire face. Il prend donc les émotions de plein fouet, il vit des tempêtes émotionnelles. Il faut alors que l’adulte aide l’enfant à exprimer ses émotions, qu’il comprenne que ce ne sont pas des caprices.
L’adulte doit être empathique, autrement dit sentir et comprendre les émotions de l’enfant. Quand on humilie un enfant, on abîme son cerveau. Au contraire, quand on le comprend, quand on l’apaise, son cerveau se développe.
Ce qui ne veut pas dire du tout que l’adulte laisse les enfants faire n’importe quoi. Non ! L’adulte dit non quand le comportement est inadéquat, mais il le fait sans humilier l’enfant, en l’encourageant en lui disant par exemple : « Je te fais confiance, en grandissant tu vas apprendre à ne plus mordre ». Il faut beaucoup de patience avec les petits et répéter maintes et maintes fois avec douceur.
En effet, les neurosciences nous apprennent que les relations que nous avons avec nos enfants transforment leur façon d’être. Toute rencontre, toute émotion transforme en profondeur le cerveau. Le cerveau affectif et le cerveau intellectuel.
Les adultes ont un pouvoir incroyable puisqu’ils ont la capacité de faire murir le cerveau.
Si les parents se fâchent, le stress retarde le développement du cerveau de l’enfant. Alors que materner un enfant fait murir son cerveau. En langage scientifique, être bienveillant avec l’enfant permet notamment à son cortex préfrontal, à son hippocampe de se développer. Autant de cellules qui agissent sur la mémoire, la sociabilité etc.
Petit trois : Un enfant qui est accepté tel qu’il est, sera plus ouvert aux autres.
Quand on aide un enfant à exprimer ce qu’il ressent, quand on reconnaît qui il est, on lui permet d’être à son tour empathique, de comprendre les autres et de les accepter.
Un enfant élevé avec empathie, aimé tel qu’il est, comprendra les autres, sera social.
Pour l’enfant, les différences de couleur de peau par exemple ne posent aucun problème. L’enfant accepte tout le monde, pourvu qu’on l’ai accepté comme il est. Mais l’enfant est une éponge et si l’adulte a une attitude négative devant un enfant différent, il l’imite et le cercle vertueux est brisé.
Les différences culturelles par exemple peuvent être un problème pour les adultes, pas pour les enfants. Sauf s’ils sont entourés d’adultes critiques à l’égard de la différence.
« Quand le parent guide, éveille l’enfant au monde qui l’entoure, à sa beauté, qu’il l’encourage à l’explorer, à le découvrir, il l’entraîne, le soutient dans son plaisir de vivre et de grandir. » (3)
Autrement dit, en encourageant un enfant à la découverte, on l’aide à devenir un être entreprenant, curieux. Un enfant aimé pour ce qu’il est, c’est-à-dire cet être unique au monde, sera ouvert aux autres.
Notes :
(1) p. 38 in « Pour une enfance heureuse »
(2) p.39 in « Pour une enfance heureuse »
(3) p. 254 in « Pour une enfance heureuse »